Lors du développement d'un phototype, c'est-à-dire lors de la transformation des halogénures d'argent exposés en agrégats d'argent, se forment des produits d'oxydation dont la présence, indésirable en photographie noir et blanc, est à l'origine de la formation des colorants dans la photographie en couleur.
On peut écrire la relation générale suivante :
Ag+ + Agent développateur → Ag + agent développateur oxydé
L'astuce consiste à utiliser ces produits dérivés de la réaction de formation de l'image argentique –les agents développateurs oxydés– pour former des colorants par combinaison avec d'autres substances, appelées coupleurs ou copulents (l'utilisation directe des produits dérivés comme colorants n'a jamais pu être exploité pour la trichromie).
Seuls les agents développateurs dérivés de la paraphénylènediamine (4-amino-N-dialkyanilines), forment les composés permettant aux coupleurs de se transformer en colorants. Les agents développateurs des révélateurs chromogènes sont essentiellement du chlorhydrate de paraminodiéthylaniline (CD-1), du chlorhydrate de 2-amino-5-diéthylaminotoluène (CD-2) et des sesquisulfates monohydratés de la 4-amino-N-éthyl-N-(ß-méthane-sulfonamidoéthyle)métatoluidine (CD-3).
Lors de la réaction d'oxydo-réduction du développement se forme de la quinone-diimine, qui va réagir avec les coupleurs pour former des leuco-dérivés.
Les coupleurs sont généralement, pour le jaune, à fonction méthylénique réactive, pour le magenta à fonction méthylénique cyclique (pyrazolone), et pour le cyan à fonction méthiniques (phénols et naphtols).
Finalement ces leuco-dérivés doivent être oxydés pour former les molécules de colorant, soit à nouveau par oxydation avec deux quinone-diimines dans le révélateur chromogène même, soit lors du blanchiment, bain fortement oxydant, lors de la suite du traitement.
On peut finalement écrire la relation générale suivante pour le développement chromogène :
Ag+ + agent développateur chromogène → Ag + agent développateur chromogène oxydé
Agent développateur chromogène oxydé + coupleur → leuco-dérivé du colorant à former
Leuco-dérivé + oxydant → colorant
Les masques colorés, destinés à corriger le domaine d'absorption spectral des colorants formés, sont partie intégrante de l'image, puisqu'en fait ce sont les coupleurs eux-même qui sont colorés (grâce à la fixation sur le site réactif du coupleur destiné à l'agent développateur oxydé, d'un reste de colorant azoïque qui sera libéré lors de la copulation. Ainsi, la coloration parasite remplace la coloration azoïque du coupleur). La coloration du coupleur est la même que celle de la densité parasite, qui pourra ainsi être éliminée par simple filtrage coloré lors du tirage. La coloration orange vient du fait que les coupleurs magentas sont colorés en jaune, et les coupleurs cyans en rouge, les coupleurs jaunes n'étant pas "masqués".
L'argent formé lors du développement chromogène est devenu inutile et doit être éliminé, en même temps que les halogénures d'argent non utilisés. Il s'agit donc de transformer cet argent en un composé, insoluble, pouvant être rendu soluble par le fixage.
Pour ce faire on a recours à une réhalogénation de l'argent dans un bain fortement oxydant, généralement sous la forme d'une rebromuration, grâce à l'oxydation de l'argent par le ferricyanure de potassium 4K3 Fe(CN)6, en présence de bromure de potassium. On peut écrire la relation suivante :
4K3Fe(CN)6 + 4Ag → Ag4Fe(CN)6 + 3K4Fe(CN)6
Ag4Fe(CN)6 + 4KBr → 4AgBr + K4Fe(CN)6
La réhalogénation des filtres jaunes CLS -ColloïdaL Silver- (filtre constitué d'argent en suspension et destiné à opérer la sélection des couleurs correctement sachant que toute couche photosensible argentique est en principe sensible au bleu et que cette sensibilité doit être supprimée pour les couches destinées aux sélections du vert et du rouge) a pour but de permettre l'élimination de ce filtre lors du traitement. Aujourd'hui les filtres CLS (appelés aussi Carey-Lea filters) sont parfois remplacés par des filtres constitués de colorants qui seront éliminés dans l'un ou l'autre bain du traitement.
Dans le traitement des papiers, le blanchiment et le fixage constituent un seul bain combiné, dans le but de raccourcir le temps de traitement. Les principes et les substances restent les mêmes.
Un bain d'arrêt est parfois préconisé, mais cela dépend essentiellement de la conception de la machine de traitement et de son taux de "carry-over", c'est à dire de transport de produit d'un bain dans le suivant, et du pouvoir d'acceptation par ce bain des substances importées du bain précédent par le film, le papier et le mécanisme de transport des films.
Les halogénures d'argent inutilisés, ou reformés lors du blanchiment, doivent être rendus soluble pour pouvoir être éliminés.
Cela consiste à transformer ces restes en sels solubles, grâce à des composés solubilisants ou complexants (nous ne parlerons pas de la stabilisation qui consiste à transformer les halogénures d'argent en composés stables insensibles mais non solubles).
Dans la pratique c'est le thiosulfate de sodium Na2S2O3 + 5H2O (ou d'ammonium NH4) qui est le plus utilisé comme complexant, formant des argentithiosulfates d'argent d'abord insolubles, puis finalement solubles après réaction avec la même substance.
On peut écrire la relation suivante :
Na2S2O3 + 2AgBr → Ag2S2O3 + 2NaBr (insoluble)
Na2S2O3 + Ag2S2O3 → 2NaAg2S2O3 (faiblement soluble)
Na2S2O3 + NaAg2S2O3 → Na3Ag(S2O3)2 (soluble)
Na2S2O3 + Na3Ag(S2O3)2 → Na5Ag(S2O3)3 (soluble)
Le lavage permettra la répulsion des sels d'argent et des sels de fixage hors des couches de gélatine, ne restant alors que les colorants et les coupleurs, ces derniers ne pouvant être éliminés par une procédure semblable à celle du fixage.
Après le taux résiduel de thiosulfates contenus dans la couche (normalement éliminés lors du lavage), la bonne conservation des colorants est dépendante du pH de la couche, qui doit être tamponnée entre 4,2 et 6,0.
La stabilité des coupleurs est obtenue par la neutralisation de leurs sites réactifs afin qu'ils ne se dégradent en composés colorés, ou qu'ils ne réagissent avec les colorants et les décolorent, ce qui est obtenu grâce à un bain de formol dilué.
Les papiers ne sont pas soumis à ce dernier bain, par soucis de gain de temps.